La Sorcière, « Michelet pardonne au diable, pas aux hommes. »
EAN13
9782814505445
Éditeur
PublieNet
Date de publication
Collection
Nos Classiques
Langue
français
Fiches UNIMARC
S'identifier

La Sorcière

« Michelet pardonne au diable, pas aux hommes. »

PublieNet

Nos Classiques

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9782814505445
    • Fichier EPUB, libre d'utilisation
    • Lecture en ligne, lecture en ligne
    • Fichier Mobipocket, libre d'utilisation
    • Fichier PDF, libre d'utilisation
    2.99
Michelet, c'est l'irruption de l'Histoire dans la pensée, avec les outils de
la littérature.

Il vient de terminer son Histoire de France. Il reste tant de nuit. Dans cette
nuit, le crime: crime collectif, même si l'Église lui sert de bras.

Dans les manuels de l'Inquisition, dans les vieilles relations des procès de
sorcellerie, Michelet découvre la naissance d'une idée: la femme.

L'étendue du crime, les centaines ou milliers de victimes, en expiation de
quoi ? L'inconscient collectif de l'homme face à ce qui lui fait peur.

L'examen est révoltant, il est dur, à la limite parfois de l'insoutenable.
Mais les rouages ne sont pas des fantômes dont nous nous serions à jamais
débarrassés.

L'enquête de Michelet est passionnante en elle-même, elle ouvre à grands pans
sur notre présent.

———

L'idée qui me guide depuis longtemps : avoir dans ma bibliothèque numérique
les livres qui ont compté pour moi, tout simplement. Et Michelet en est. La
mer, quel immense poème... On a complété par cet étrange texte de curiosité
dans le monde, L'Oiseau...

Pour la Sorcière, personne n'avait réalisé de version numérique. Ça m'avait
demandé quelques mois, mais, dans ces temps premiers de publie.net, au moins
je l'avais mise en ligne. Depuis, le niveau d'exigence a monté. Relecture,
nouvel epub, couverture aux bons soins de Roxane Lecomte.

Et surtout, l'idée que notre intervention, qui justifie de reprendre ces
magnifiques trésors du domaine public, c'est le lien qu'on peut en faire à la
lecture au présent. Sur le web, tout est offert, mais guider et mettre en
avant les enjeux, ça passe par la lisibilité même, l'ergonomie de ce qu'on
fait du texte, mais ça passe aussi par cet énoncé.

Hervé Jeanney, en tant qu'historien, s'en est chargé (et de la relecture pour
l'établissement du texte). Il nous propose un préambule qui renverse
radicalement les clichés sur Michelet. Tenir la ligne frontière entre le
travail de l'historien et celui de l'écrivain. Replacer la lecture du Moyen
Âge, qui a tant évolué depuis 80 ans, dans cette dynamique même
d'appropriation et lecture.

Ça ne change rien aux horreurs que décrit Michelet, et à une question qui ne
peut pas s'appréhender sans poser politiquement le rôle de la femme dans la
société, en permanence lisible en creux dans les énoncés qui les condamnent
pour sorcellerie, et tuent.

Voici ce préambule d'Hervé Jeanney, et – pour nos abonnés qui auraient déjà
téléchargé la version initiale de la Sorcière, bien sûr penser à la remplacer
par celle-ci !

François Bon

———

En 1862, quand paraît La Sorcière, Michelet a 64 ans. Autant dire qu'il n'est
plus un perdreau de l'année. De lui, de son œuvre, Pierre Chaunu, historien
archi reconnu-encensé-installé, dira "au niveau historique, c'est nul". Parce
que Michelet, souvent, écrivit non en historien mais en écrivain.

Touffu, éclaté, fiévreux même, La Sorcière est un livre de convictions qui se
soucie comme d'une guigne de vérité suprême. Au contraire. C'est un livre où
l'auteur livre ses écœurements devant la bêtise du dogme religieux, la
stupidité des inquisiteurs, le gâchis humain que souvent le Moyen Âge livra.
Et ses séquelles obscurantistes jusqu'en plein XVIIIe siècle.

Bien sûr, on sait depuis que Michelet "inventa" le médiéval horrifique. Il le
tenait tellement en horreur qu'il le noircissait à outrance. Mais ces excès ne
sont pas si gênants puisque l'historiographie, depuis, s'est chargée
d'équilibrer la balance. Et puis, en histoire, science inexacte s'il en est,
le questionnement est plus important encore que le verdict, et La Sorcière
questionne, retourne et défriche en tous sens. Contes, légendes, et même
tentatives (maladroites, mais quand même, 1862 !) d'ethnohistoire, textes
religieux, édits, la matière que Michelet recycle est immense. Sans compter
toutes les citations faites "de tête", venues du fin fond de sa culture
classique.

Ce livre n'est pas sans défauts, le premier étant sans doute de pousser le
lecteur à se demander souvent ce que l'auteur fait dans ce maelstrom d'idées,
d'impressions et de citations ; à tel point qu'à plusieurs reprises on se
croirait perdu dans un tableau de Jérôme Bosch, sans en trouver ni le sens ni
la sortie. On trouve aussi, perlées, de nombreuses allégations pseudo-raciales
si fréquentes au XIXe siècle, agaçantes caricatures visant le Nordiste
appesanti et renfrogné, le Sudiste sauvage et solaire, l'Espagnol exubérant,
le Jésuite enfin accablé d'absolument toutes les tares. Pas grave : tant de
phrases sublimes vous restent après qu'on oublie ces travers.

Michelet, conscience hugolienne et scientiste à la fois, explose de colère, de
sarcasme, d'inventivité et de fulgurances dans ce livre unique. Dénonciation
de l'obscurantisme, de la misogynie, de l'exploitation des faibles, c'est
comme si l'ennui profond qu'il devait ressentir en ces années dolentes de
Napoléonisme (le III, pas le 1er) venait lui fouetter le sang. Souvent, on se
demande si le réel sujet du livre n'est pas Satan lui-même, si souvent cité,
et dont Michelet n'a pas décidé fermement s'il était l'ennemi absolu ou la
providence de l'humanité. En cela, il sépare clairement ces inquisiteurs plus
bornés et dégénérés les uns que les autres (pages horrifiques d'orgies en tous
genres) du démon, conceptuel, ironique et presque attachant. Michelet pardonne
au diable, pas aux hommes.

Hervé Jeanney
S'identifier pour envoyer des commentaires.