Un Train initiatique - Conte de l'Éros triste
EAN13
9782866888275
Éditeur
Dominique Leroy
Date de publication
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Un Train initiatique - Conte de l'Éros triste

Dominique Leroy

Livre numérique

  • Aide EAN13 : 9782866888275
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    2.99
**EXTRAIT**


**II**

J’étais maintenant complètement réveillé. Quand très poliment, elle me demanda
d’une voix douce et posée si elle pouvait s’asseoir près de la fenêtre, c’est
avec un peu d’émotion dans le timbre que je lui répondis de s’installer à sa
convenance. Me remerciant, elle déposa son petit bagage, et, avec un sourire
qui me permit de prendre la juste mesure de la blancheur des petites perles
qui ornaient sa bouche, elle sollicita mon acceptation de laisser la lumière
allumée en arguant délicieusement de sa peur du noir.
Autant l’avouer, je n’avais plus du tout sommeil et l’idée de passer quelques
heures dans un espace aussi réduit en compagnie d’une telle beauté commençait
à jouer de manière sérieuse sur mes sens, même si la morbidesse de ses traits,
jointe à un certain raffinement de manières et à un je ne sais quel air de
retenue qui commandait le respect, m’induisait à adopter une attitude prudente
dénuée de toute familiarité excessive. Ne croyez pas que je fusse pusillanime
en matière d’approche du beau sexe, mais ma vieille habitude de déshabiller en
un clin d’oeil toutes les femmes à peu près potables qui s’offraient à mon
regard m’avait permis de remarquer l’alliance que la dame, puisqu’il
s’agissait bien d’une dame et non d’une demoiselle, portait à sa main gauche
aux doigts fuselés que surmontaient des ongles soigneusement entretenus
colorés d’un rose délicat.
Entretenant déjà une liaison torride avec une femme mariée et point trop
préoccupé de compliquer encore davantage mon existence avec une seconde
maîtresse dont toute l’apparence illustrait l’adage bien connu selon lequel «
avec les femmes faciles, c’est facile, avec les autres, ça l’est moins… » ,
j’adoptai une politique de retrait stratégique avant le début même des
hostilités, tout en me promettant de ne pas rater l’occasion de m’engouffrer
dans la brèche, si tant est qu’une ouverture pût être tentée. C’est pourquoi,
faisant mine de fouiller dans ma petite valise, j’en extirpai un magazine
directement acheté à la gare avant mon départ, et, autant pour me donner une
contenance que pour gagner du temps, en attendant qu’elle prenne l’initiative
de la conversation, je fis semblant de me plonger dans la lecture d’une
fastidieuse critique littéraire, oeuvre de l’un de ces universitaires,
écrivains souvent ratés qui prennent leur revanche sur le véritable talent en
essayant de faire accroire aux gogos que l’auteur a voulu exprimer tout un tas
de choses absconses ou tirées par les cheveux alors que jamais telle fut son
intention.
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