Les naufragés de l'intitut Fermi

Au XXIVe siècle, l’Institut Fermi, situé sur une petite île de la Manche,
envoie ses agents au XIXe siècle afin d’influencer le cours général de
l’histoire pour résoudre le grand paradoxe de Fermi et ainsi éviter que
l’humanité ne s’autodétruise. Sous la tutelle du professeur Miyamoto Miyamoto,
Louis Maine, Ángel Cambas et Casimir Laï plongent dans le passé. Ils sont des
Dériveurs, choisis par l’Institut car ils présentent le même patrimoine
génétique qu’un homme du XIXe siècle. En effet, en Dérive, ce n’est pas
l’individu mais juste sa conscience qui voyage, entre deux corps génétiquement
identiques. Encore plus loin dans le futur, dans ce qu’il reste de l’Institut
Fermi en ruine, une jeune femme, Gwenn, a réussi à rejoindre un groupe
clandestin qui cherche à tout prix à s’opposer aux Dériveurs. Pour cela, eux
voyagent, physiquement, dans le temps. Première partie Louis Maine est
fatigué, Casimir n’est pas rentré. Leur plongée en plein cœur du siège de
Sébastopol ne s’est pas bien passée. Il se décide à plonger, sans en avoir la
permission, pour sauver son ami. Il le retrouve et le ramène mais il rencontre
Gwenn qu’il affronte et blesse. Lors de leur altercation, la jeune femme égare
un petit objet, une sorte de capsule. À son retour, Louis raconte ce qu’il a
vécu au professeur Miyamoto qui lui apprend que l’existence de cette autre
troupe de voyageurs temporels est connue mais que l’Institut se débarrasse de
ceux qui semblent leur donner une quelconque importance. C’est ce qui est
arrivé à un de ses amis quand il était Dériveur. Deuxième partie Gwenn a du
mal à se remettre de la plongée au cours de laquelle elle a été gravement
blessée par Louis. Elle a perdu l’enfant qu’elle portait et abandonne la
lutte. Quand elle apprend qu’elle a égaré une capsule et que cela met en péril
tout le plan de sa communauté, elle se décide à reprendre le combat. Louis est
envoyé par Miyamoto au XVIIe siècle pour rencontrer son ancien camarade, banni
dans le passé. Ce voyage lui permet de prendre conscience que la stratégie de
l’Institut pour la sauvegarde des humains n’est pas aussi claire qu’il n’y
paraît. Pendant ce temps, les deux camps préparent la récupération de l’objet
perdu à Paris. Là-bas, Louis veut frapper la troupe adverse au cœur et
s’éloigne du plan précis défini par Miyamoto. Il affronte donc une troupe de
voyageurs, et se rend compte que sa plongée n’est qu’un leurre. La capsule est
récupérée autrement et l’action de Louis porte un coup dur aux camarades de
Gwenn. Cependant, au cours de cette plongée, Louis altère une de ses amis.
Dépassé par l’émotion, il quitte l’Institut Fermi. De son côté, Gwenn est
jugée responsable des troubles qui agitent sa communauté. Elle est condamnée à
ne plus voyager dans le temps mais à retourner travailler comme petite main,
sans aucun avenir possible. Toutefois, elle poursuit ses recherches dans le
plus grand secret et prépare sa vengeance. Troisième partie Louis, raisonné et
apaisé, accepte de participer à la prochaine campagne d’altérations, pendant
l’expédition impériale au Mexique. Il se retrouve au cœur d’une violente
bataille avec Casimir à ses côtés mais Ángel dans le camp d’en face.
Lorsqu’ils prennent conscience de cela, les Dériveurs comprennent que
l’Institut cherche à se débarrasser d’eux à cause de ce qu’ils ont découvert.
Miyamoto, furieux contre ses chefs, se voit contraint de s’exiler mais réussit
à entrer en contact les voyageurs du futur avant son départ pour leur proposer
une trêve. Gwenn reçoit ce message et comprend qu’il n’y aura aucune victoire
possible si les deux camps s’affrontent, et que c’est ensemble qu’ils
arriveront à résoudre le paradoxe de Fermi. Elle brave son bannissement et
arrive à convaincre son équipe. Elle sauve Louis, blessé et le ramène à sa
cause. Elle décide d’enfanter un clone de Louis aux temps des premiers hommes
pour que celui-ci y dérive et bouleverse radicalement l’histoire. Ensemble,
les deux groupes y parviennent mais à son retour, Louis découvre qu’il n’a
fait qu’accélérer l’arrivée de la fin du monde. Extrait 1 Les Epsilons sont un
modèle assez commun. Aucune caractéristique physique hors norme, sinon une
incroyable mémoire. Elles sont partout, petites mains corvéables et dociles,
facilement maîtrisables, souvent timides à l’excès, craintives même,
quelquefois. Pas elle. Ces femmes ne sont plus ses semblables qu’en apparence.
Elle, elle a quelque chose de différent. La génétique ne fait pas tout, l’âme
humaine est trop complexe. La chenille et le papillon ont aussi le même génome
et sont pourtant si différents. Ses semblables ont oublié qu’elles étaient
humaines. Extrait 2 Choc. Réveil. Décharge d’adrénaline. Louis prend une
profonde inspiration. Sa conscience reflue doucement. Le Dériveur garde les
yeux fermés. Il est serein. Comme à chaque retour, il s’interroge. Un réveil
est autant un début qu’une fin, autant une naissance qu’une mort. Un seul
instant sépare les deux extrêmes. C’est sur ce point de bascule que Louis
médite. Depuis toujours, cette réalité lui échappe. Il aimerait se réveiller,
ne serait-ce qu’une seule fois, à l’exact moment où son esprit revient, et
pouvoir se dire que c’est là, maintenant, qu’il vient d’émerger. Est-ce cette
inspiration, cette pulsation cardiaque, ce battement de cils, cette décharge
hormonale ? Qui donne la pichenette sur la bille en équilibre ? Le Dériveur
pense à son jumeau, son binôme, là-bas, ainsi qu’à cet étrange sixième sens
qui les relie, à tout ce qu’ils partagent malgré la distance. Et quelle
distance ! L’autre est déjà si loin… Combien ? Cinq siècles… calcule-t-il. Et
dire qu’il était avec lui avant la pichenette, avant la bille, avant la
renaissance – avant la presque mort, corrige-t-il aussitôt. Cinq siècles. Car
ainsi va la Dérive, cet art qui fait voyager l’esprit d’un jumeau vers un
autre, depuis le sommeil profond. Elle propulse Louis Maine et ses comparses
Dériveurs, funambules au-dessus du néant, en équilibre sur le fil invisible et
ténu qui les relie à leurs jumeaux du passé, d’une époque à une autre. La
pression redescend. Le Dériveur parvient à maîtriser sa respiration. Il ne
dort plus. Louis sent que son âme a retrouvé son antre originel. Il a réussi.
Il est rentré. Extrait 3 Le Dériveur se fige, surpris. Un instant, il croit
qu’il s’agit d’un autre Dériveur venu le trouver pour lui demander de rendre
des comptes sur sa présence ici. Il se ravise vite lorsqu’il sent contre sa
tempe la pression froide du métal du canon d’un revolver. Louis retient
toujours son souffle. Ce ne sont pas les manières de l’Institut. Qui, alors ?
La voix féminine lui est familière. Les yeux clos, il réfléchit à toute
vitesse. Une seule voix. L’autre est peut-être seule. Si elle avait voulu
l’abattre, elle l’aurait déjà fait. La désarmer ne devrait pas être trop
compliqué. Il doit jouer sur l’effet de surprise. Louis bande ses muscles. Il
compte jusqu’à trois. Un. Deux. Trois. Louis bondit. Et ne parvient pas à
terminer son geste. Son sang ne fait qu’un tour. Face à lui, en chair et en
os, en 1859, se tient l’infirmière qu’il a croisée à son réveil. Sa peau
cuivrée, ses taches de rousseur à la base du cou et sur les pommettes. C’est
bien elle. Il reconnaît son visage sévère et ses yeux noirs et froids. Elle
porte une tenue d’infirmière du corps expéditionnaire, ses cheveux sont rangés
dans un fichu blanc, son tablier et sa jupe sont maculés de sang. Le Dériveur
se fige, interdit, déglutissant avec peine. Présentation des personnages Les
Naufragés de l’Institut Fermi est un texte qui repose sur deux trames
narratives qui s’entrecroisent très tôt. Ces deux trames développent chacune
un univers différent à plusieurs millénaires d’intervalle. Si l’intrigue
initiale laisse croire à l’affrontement entre les deux factions décrites,
l’histoire ne comporte pas de figures d’opposition marquée, en ce sens que
chacun est mu par des motivations compréhensives et justifiées. C’est
fondamentalement une histoire d’amitié et de rébellion contre l’autorité dans
son acception la plus naturelle. • Louis Maine Louis est un Dériveur
chevronné, d’une trentaine d’années. Il est le leader de la petite équipe de
Musashi. Son enjeu est d...