Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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18 avril 2016

J'ai raté mon dernier rendez-vous avec les éditions Vents d'ailleurs, mais je ne voulais pas rester sur un échec, donc je me suis tout de suite replongé dans l'une de leurs publications, et là, bonne pioche. Amateurs de romans africains, précipitez-vous et non-connaisseurs itou. Truculence de la langue, inventions, situations inédites et tellement bien racontées qu'elles forcent le sourire -même lorsqu'elles ne sont pas forcément drôles- et surtout le respect, personnages hauts-en-couleurs. Tout est très bien dans ce roman -si je fais exception d'un grand nombre d'intervenants qui peuvent devenir difficiles à reconnaître et d'un peu de longueurs, de répétitions de situations évitables et qu'on peut donc passer un peu plus vite.

Je reprends dans l'ordre : la langue : du français mâtiné d'expressions, de tournures très personnelles, de trouvailles, d'inventions qui rendent ce texte vif, moderne, enlevé, joyeux. Lorsque Belladone parle, c'est fleuri et encore compréhensible : "Quand je suis arrivée chez le Maître, il n'y avait que des hommes et, les premières nuits, j'ai dormi au salon avec Séraphin, parce qu'il était encore petit. Mais il a grandi. Les autres ont eu peur que nos mains n'aillent explorer sous l'obscurité ce que devenaient nos biologies avec les intrigantes tectoniques de nos pubertés respectives." (p.53) Lorsque Le Cheminot prend la parole, on est averti avant que "Cet homme massacre laborieusement la langue de Molière. Prière de ne retenir que l'idée de ses phrases et, surtout, de bien vouloir éloigner les enfants en scolarité, pendant qu'il témoigne." (p.73) Parce que n'oublions pas, ce roman est une émission de radio en direct, et lorsque les témoins débordent sur l'aspect politique, économique, sur des sujets qui gênent le pouvoir, eh bien le speaker reprend la main et passe une chanson pour couper court à toute interprétation contre le pouvoir, ou intervient pour remettre le propos dans le sens qui plaît, celui à la gloire du pays, cet animateur-radio interventioniste est l'une des trouvailles de Sinzo Aanza qui augmentent l'intérêt du livre. Et pour revenir au Cheminot, il est vrai qu'il a un langage très personnel, l'avertissement n'est pas vain ; et donner à chaque intervenant un langage reconnaissable est une très bonne idée de l'auteur, ce qui permet de se retrouver un peu mieux dans leur grand nombre et leur diversité.

Je parlais également de personnages truculents, eh bien nous sommes royalement servis : forts-en-gueules, exubérants, travailleurs du matin au soir pour tenter de gagner plus, ils sont directs, francs et parfois trop, jusqu'à la confrontation ; en cela les femmes ne sont pas en reste qui attisent la fatigue et la jalousie des hommes. Iceux, souvent bigames ne peuvent pas supporter que leur virilité, leur masculinité soient contestées voire seulement mises en doute, ce qui donne naissance à quelques altercations et même une arrestation assez mouvementée racontée par Le Cheminot qui prend une allure tragi-comique, mais plus comique que tragique. Chacun témoigne de la difficulté de vivre dans des conditions précaires, dans des habitats insalubres; tentant de garder son humanité malgré les conditions de vie. Avant, c'étaient les colons qui avaient richesse et pouvoir, puis les dirigeants au temps du Zaïre, et maintenant ce sont les Chinois arrivés en force en Afrique et la mondialisation qui dictent leurs règles économiques, et toujours les pauvres payent.

Sinzo Aanza écrit là son premier roman. Il vit en République Démocratique du Congo, j'ai même lu je ne sais plus où, qu'il vivait à Lubumbashi, ville qui, avant 1965, se nommait Elisabethville et qui est connue pour être la capitale du cuivre.

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18 avril 2016

Me voilà bien embêté, d'une part parce que j'aime bien les éditions Vents d'ailleurs et d'autre part parce que ce roman n'a absolument rien pour me déplaire et qu'il ne m'a absolument pas déçu. C'est juste que je n'ai pas réussi à entrer dedans, je ne l'ai pas décodé, ne suis jamais parvenu ni à m'y intéresser ni a vraiment le comprendre. Et pourtant, j'ai bien aimé l'écriture de Simone Henry Valmore, vive, dynamique, souvent faite de phrases courtes, sèches qui claquent, le tout début par exemple :

"Ils attendent. Comme chaque jeudi. A quinze heures précises. Ils sont là. Et ils attendent. Ils attendent comme on attend au théâtre le lever de rideau. Mais ce n'est pas tout à fait comme au théâtre. La pièce à laquelle ils sont conviés n'est pas encore annoncée. Est rarement annoncée. C'est ainsi. Et c'est la règle du jeu. Ils savent seulement qu'elle aura lieu et s'en contentent. Mesurent tous leur chance de pouvoir être là. Alors qu'importe. Oui qu'importe qu'elle soit sans titre, la pièce qui va se jouer devant eux. Le spectacle peut bien changer chaque fois. Aucune importance." (p.9)

Je l'ai lu jusqu'au bout (101 pages) sans jamais vouloir le lâcher, mais sans jamais réellement comprendre où voulait en venir l'auteure. Me restent néanmoins une ou deux images assez précises. Tant pis, des fois les livres ne nous parlent pas...

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18 avril 2016

Sur le papier ce roman policier promet d'être léger, enlevé et très agréable, le résumé est tentant et la couverture itou. Mais que se passe t'il dès les premières pages ? Rien ne décolle, l'humour est distillé à dose homéopathique, ou alors je ne suis pas sensible à la plaisanterie germanique -car, comme son nom ne l'indique pas du tout, Mario Giordano est Allemand. Persuadé d'être en train de lire un polar qui promet, je persévère, et enfin, page 120 la situation semble évoluer et bouger. Ouf ! ... Las, c'était trop d'espoir, nous voilà repartis pour des digressions absolument inutiles, des longueurs, des situations pas drôles, ...

Malgré un personnage principal atypique, intéressant, Mario Giordano ne trouve jamais le bon rythme et finit par lasser le lecteur que je suis. Ajoutons des détails agaçants, comme ces phrases emplies de termes étrangers -non traduits ou expliqués- qui gênent ma bonne compréhension et je suis très vite largué et franchement déçu. J'abandonne et ne vais même pas au bout de cette enquête laborieuse qui ne nous apprend rien sur la vie les mœurs des Siciliens et qui ne joue même pas la carte du décalage comme elle aurait pu avec ce personnage principal. Une suite est a priori prévue. Sans moi.

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18 avril 2016

Le but de la collection Incipit est de raconter des premières marquantes passées par le filtre de l'auteur. Le(s) fait(s) réel(s) est (sont) là, la fiction, l'invention itou. Dans ce premier volume, très court, cent-dix pages aérées en comptant un bref dossier sur l'Académie et sur l'élection de Marguerite Yourcenar, des biographies et bibliographies succinctes de l'auteur et de l'illustratrice de la couverture (Catel, que j'ai découverte dans son excellentissime roman graphique, Kiki de Montparnasse), François Bégaudeau prend des libertés avec l'Histoire mais c'est pour mieux nous intéresser à son histoire. Les libertés qu'il prend sont intéressantes, car elles donnent un peu de légèreté et de vivacité au texte. Non pas d'ailleurs qu'il en eût besoin, le texte est enlevé, drôle, ironique, parfois sarcastique, très moqueur avec les gens qui le méritent (enfin ceux dont lui et moi croyons qu'ils le méritent). Le jour de l'élection de Marguerite Yourcenar est très symptomatique du style résolument ironique du livre : "Le 6 mars 1980, aux alentours de 15h10, le malheureux (le fauteuil 16) ne vit donc pas l'huissier présenter l'urne à chacun des votants, puis en déverser le contenu sur le bureau où René de la Croix de Castries, directeur en exercice, assisté d'Edgar Faure, chancelier du trimestre, s'appliquèrent au décompte. Le laxisme général d'après 68 ayant rendu possible que des hommes de lettres fussent illettrés, on releva trois bulletins marqués d'une croix." (p.72/73)

F. Bégaudeau écrit très bien, joue avec les imparfaits du subjonctif, il est très agréable à lire, fait dans le littéraire, la belle langue française (pour parler de l'Académie, c'est le minimum, mais pas forcément à portée de tous), il dérive parfois vers un certain "j'aime m'écouter écrire" un brin agaçant pour ne pas dire risible surtout lorsqu'au détour d'une phrase, il place une référence à lui-même, un peu tirée par les cheveux : "Heureusement l'évêque de Luçon (Richelieu), où un autre François ès lettres naîtrait en 1971, avait le bras long et par suite les coudées franches." (p.14). Néanmoins, ma première lecture de cet auteur me laissera un bon souvenir, j'ai bien aimé le décalage, son humour et son écriture à la fois sérieuse et drôle, comme dans ce dernier extrait où il résume en quelques lignes le combat des femmes pour l'égalité : "Croyait-on que la modernité se le tiendrait pour dit ? Chassée par la porte, elle revint par la fenêtre. Les femmes votèrent, enfilèrent des pantalons voire des jeans, dansèrent seules, reprirent un Ricard, accédèrent au carnet de chèques, poussèrent l'irrespect de la Nature jusqu'à contester les divins hasards de l'ovulation. L'Académie devait-elle faire comme si de rien n'était ?" (p.51)

Voici donc une collection qui naît sous les meilleurs auspices (et pas hospices, même si l'on parle de l'Académie française).

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18 avril 2016

Le bictionnaire c'est comme un dictionnaire mais en mieux. C'est classé par ordre alphabétique mais les définitions ne concernent que des expressions d'au moins deux mots donc, commençant par la même lettre, exemple : "Pharaon pointeur = Petankamon".

Très drôle, jamais méchant, pouvant faire appel à quelques connaissances, mais pas toujours, parfois, les définitions sont simplement simples (aïe, ça déteint) et sans sous-entendus. Parfois, bien sûr, il faut chercher un peu et se creuser le ciboulot et là, on découvre même un deuxième sens, surtout si on lit à voix haute.

J'ai noté plein d'entrées qui m'ont plu, fait rire, soulevé un "ah" un "oh" voire un "ah ah" et encore, c'est parce que je ne suis pas très démonstratif... Mon problème principal avec ce genre d'ouvrages, c'est que je ne retiens pas les passages que j'aimerais répéter pour faire rire et impressionner, alors je les ai soulignés et peux vous en proposer quelques uns pour vous mettre l'eau à la bouche :

- "Matelas Moelleux : Matelas. Mot merveilleux qui commence par "Aime" et qui finit "Paresse".

- "Fil de fer : bien que génial, le fil à couper le beurre ne vaudra jamais un string à couper le souffle..."

- "Erreur à Éviter : Traiter sa femme de mal-baisée."

- "Self Sévice : Ceux qui crient "mort aux cons !" sont rarement conscients d'avoir, alors, une attitude suicidaire."

Calembours, néologismes, logique, absurde, drôle tout cela s'applique aux définitions de Grégoire Lacroix, digne descendant d'Alphonse Allais. Un recueil à ouvrir, à lire et relire à faire connaître. A picorer partout, sur son canapé, dans le métro ou le bus, sur les toilettes, en faisant la cuisine, ... tous les endroits sont bons pour rire et sourire.

Grégoire Lacroix est aussi l'auteur du très très bon polar "Jazz Band", publié chez Flamant Noir et des "Euphorismes" chez Max Milo, en différentes présentations. Je ne sais pas vous, mais moi, je cours les commander à la librairie...

Allez, pour vous tenter définitivement, deux petites dernières :

- "Lièvre Léthargique : Quand, volontairement ou non, un lièvre a pris la forme d'une terrine, on ne peut plus grand-chose pour lui."

- "Islam Intégriste : Agence de voilage."