Le guetteur de sémaphore

«Je m'appelle María Luisa, j'ai les cheveux roux, les yeux bleus, une tache de naissance à hauteur du nombril et un passeport argentin. Mais je pourrais être tout aussi bien de nationalité colombienne ou vénézuelienne. Je ne connais pas plus l'Argentine que le Venezuela ou la Colombie. En fait, s'il n'est pas difficile de se procurer un passeport dans le centre-ville de Lima, de La Paz ou de Managua, il n'est pas toujours possible de choisir sa nationalité d'emprunt. Celle qu'un vieux Quechua m'a accordée dans une rue de Puno, près de la gare routière, me convient parfaitement.»

Trois destins croisés comme des lignes de vie et de coeur dans la paume de la main. Trois destins éphémères. Trois personnages et un narrateur (mais le narrateur ne compte pas). L'un s'intéresse au temps qu'il fait pour oublier le temps qui passe -- et inversement. L'autre voudrait se réveiller d'une réalité qui l'a fait devenir somnambule immobile. Quant à la conteuse d'occasion, on l'écoute parler à travers les masques changeants qui couvrent son visage -- des masques fragiles comme l'argile.
Trois destins différents. Un fil d'Ariane relie pourtant ces personnages. Ils cherchent tous à voir plus loin que l'horizon. Comme les guetteurs sémaphoriques.